Crise immobilière : impact du DPE pour les agents immobiliers

08 novembre, 2023

DPE

BEAUCOUP TROP DE TRAVAUX ET DES COÛTS ÉNORMES
- Henri PERRET, LAFORÊT MARSEILLE


Le DPE a pris une ampleur importante dans le choixdes achats, des locations ou des investissements, ce qui est normal. Le problème réel du DPE, c’est qu’il y a à mon sens beaucoup trop de travaux à faire aujourd’hui avec des coûts énormes. Les gens n’ont pas forcément l’argent, ni les crédits.

Après, au niveau qualitatif, le DPE est évidemment beaucoup, beaucoup plus regardé qu’avant 2021. L’information circule et il faut donc proposer aux gens des travaux pour qu’ils améliorent la note quand le logement est une passoire thermique.
Le diagnostic de performance énergétique ne peut pas faire annuler une vente, parce que nous communiquons en amont sur le DPE. Il est obligatoire dès le début du projet, donc ils connaissent très tôt le niveau de performance énergétique. En revanche, d’abord les acquéreurs nous demandent des précisions, ils nous posent des questions. Ensuite, cette information entre en compte dans leur budget, puisqu’il y a cette interdiction de louer en 2025, 2028 et 2034. Cela ne remet pas en cause l’achat, le budget si.

Le groupe Laforêt travaille avec Hellio, mais les acheteurs ne savent pas forcément lire le DPE. C’est donc important de bien leur expliquer le contenu du DPE, en fonction des murs, de l’exposition, de l’épaisseur, du mode de chauffage, etc., pour qu’ils comprennent l’origine de la déperdition énergétique. Nous leur expliquons et ça les rassure. Cela fait partie de notre devoir de conseil.

À propos de l’éventuel report de l’interdiction de louer, je pense que le problème est ailleurs. Le DPE, c’est un mal pour un bien. Mais aujourd’hui, il y a un mal logement et un défaut de logement. Plein de gens voudraient avoir un logement. En face, les logements qui pourraient être loués sont des passoires énergétiques. La question se pose : est-ce que je peux louer un appartement en G ou attendre et vivre dehors ? En quelque sorte, on a mis la charrue avant les bœufs.

C’est compliqué de se loger aujourd’hui. En plus, à certains endroits, il est impossible de défigurer des bâtiments pour faire une isolation thermique. L’isolation thermique par l’extérieur, sur de l’ancien, c’est moche. Sur du semi-récent, c’est un peu plus beau, mais le coût est énorme. Certains propriétaires n’ont pas les moyens de faire les travaux et par conséquent, ils ne peuvent pas louer. C’est un réel problème. Je pense que mes confrères ont le même discours.

Le DPE est une bonne chose. Je ne dirai jamais que c’est une mauvaise chose, mais il n’y a pas de logement. On demande à des propriétaires de faire des travaux alors qu’ils n’ont pas l’argent nécessaire. Ils ne peuvent pas les faire. Alors ils vont mettre leur T3 en lieu et place sur le marché quand c’est possible. Dans le cas contraire, ceux qui ont un T2 et qui souhaitent déménager dans un T3 ne peuvent pas, car c’est une passoire thermique. Cette situation va figer le marché immobilier.

C’EST LE CAHIER DES CHARGES DU DPE QUI EST MAUVAIS
- Hugo DELOFFRE, ORPI CLAUDE BERNARD IMMOBILIER


Pour nous qui sommes en plein cœur de Paris, basés sur le 5e arrondissement, le DPE et l’interdiction de louer ont un impact significatif sur notre activité. Avant le Covid et avec un DPE vierge, ou réglé sur un cahier des charges différent de ce qu’il est aujourd’hui, ça ne posait aucun problème. En effet, il n’y avait pas d’interdiction à la clé.

Aujourd’hui, on sait que l’interdiction va commencer en 2025 et se poursuivre jusqu’en 2034 et ça a de grosses conséquences. D’abord, les gens réfléchissent à deux fois. Ensuite, dans les immeubles anciens, beaucoup d’appartements sont mal notés car énergivores. Par conséquent, les ventes tournent au ralenti sur ce type de produits, les acheteurs hésitent.

Combiné, en plus, à une augmentation des taux et la petite crise immobilière que nous vivons actuellement… Ce n’est pas évident et ça fait un moment que ça dure. On constate aussi un impact sur le marché locatif. Il y a des gens qui ont moins acheté depuis deux ans et demi-trois ans. Ils mettent donc moins de biens en location alors qu’il y a de la demande. C’est très compliqué. À cette rentrée, sur ces mois de septembre et octobre 2023, ça n’a jamais été aussi tendu de trouver un appartement à louer à Paris. Je travaille dans ce secteur depuis longtemps et je n’ai jamais vu ça.

Nous devons forcément donner des conseils de rénovation. Je fais de la gestion locative, donc je me dois de conseiller les bailleurs à ce sujet-là. Bien sûr, nous essayons de trouver des solutions avec des prestataires, mais ce n’est pas mon métier de faire des travaux. Nous tâchons simplement d’agir à notre niveau pour aider les propriétaires et faire avancer la situation.

L’idée du DPE, en soi, n’est pas mauvaise du tout. C’est la manière dont le mode de calcul et le cahier des charges ont été rédigés qui est mauvaise. Aujourd’hui, vous avez des appartements qui sont qualifiés de passoires énergétiques, alors que ce terme est juste une honte. Ils ont des doubles vitrages, des radiateurs dernier cri… Et on les qualifie de passoires parce qu’ils sont en F et au dernier étage. Comment est-ce qu’on fait pour redonner à ces appartements des notes correctes ? On a alerté les pouvoirs publics pour le leur demander.

Reporter l’interdiction de louer, non, la date n’importe pas forcément. Mais déjà, il faudrait modifier le cahier des charges du DPE. Ce serait très intéressant et intelligent d’avoir un DPE adapté à des immeubles différents. Avoir un DPE avec la même grille de notation pour tous les types de bien, que ce soit une maison de 2021 ou un appartement du 18e siècle, ça n’a aucun sens. Avec tout l’or du monde, l’immeuble du 18e siècle ne sera jamais aussi bien isolé que la maison de 2021. C’est logique.


Extrait du site Quotidiag le 08/11/2023
https://www.quotidiag.fr/crise-immobiliere-impact-du-dpe-pour-les-agents-immobiliers/

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